Introduction
Cela fait depuis des années que je m'intéresse à l'Afrique du point de vue culturel, puisque mes compatriotes d'origine ont toujours eu des liens dans plusieurs pays Africains avec tant d'histoire de vécu riche et enrichissant à savoir. Cette expérience à distance avait pris une autre dimension lors de l'exécution de projets d'envergures dans les pays du Golfe, en ayant recours aux chargés de projets spécialisées de l'Afrique du Sud. Ensuite fût une collaboration de plus près avec des collègues issus de l'Afrique qui venaient à Montréal pour étudier la gestion. C'est ce qui nous a permis de mieux comprendre l'importance de notre implication et la mission à laquelle nous sommes invités à assumer en tant qu'entrepreneurs Québecois et Canadiens. Le premier geste posé fût en 2012 en participant aux activités du mentorat de jeunes entrepreneurs dans le Réseau de Professionnels Africains REPAF.
Rendus là, à l'ère de l'économie du savoir, nous sommes disposés à un rapprochement envers les entreprises Africaines dans le but de les assister à prendre les meilleurs chemins vers une croissance soutenue et responsable pour une prospérité durable.
I B El-Khoury
Fondateur
Les
sociétés entrepreneuriales africaines
Une
idée largement véhiculée par les médias, politiciens et économistes présente l’exploitation
des ressources naturelles en Afrique comme étant un tremplin potentiel pour
sortir le continent de longs siècles de misère et de sous-développement. Cette
pensée fait écho aux forts taux de croissance économique, enregistrés aux cours
des dernières années, par de nombreux pays africains dont l'économie est
dépendante de l'exploitation du pétrole et de produits miniers. Or, ces
chiffres sont artificiellement gonflés par les fluctuations mondiales du baril
de pétrole et des cours à la bourse des minerais. En conséquence, nous pouvons
voir que présentement un grand nombre d'États Africains (Nigeria, l'Angola, le
Gabon, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale) qui ont misé sur les recettes
pétrolières éprouvent de la difficulté à boucler leur budget en raison de la
chute du prix mondial du baril en 2014[1]. Il en va de même pour la
production minière (Afrique du Sud, Zambie) puisque les compagnies réduisent leurs
investissements en Afrique pour se concentrer dans d’autres parties du monde où
les coûts de production sont moins affectés par le manque d'infrastructures, la
corruption, l'insécurité et l'absence d'industries de transformation[2].
Or,
cette stratégie de miser sur la manne pétrolière ou minière découle d'une
vision axée sur le court-terme, qui présente le désavantage de ne pas fournir
la stabilité économique et sociale nécessaire favorisant la création d'une
richesse durable. En Algérie et au Nigéria, le tout pétrole a détruit une
agriculture autrefois prospère. De plus, lorsque cette richesse n’est pas
détournée afin de nourrir la gabegie, la corruption et le gaspillage, elle
constitue la base d’une économie de rente peu favorable à l’épanouissement
d’une véritable culture entrepreneuriale dynamique.
[1] Chute
du cours du pétrole : qui perd, qui gagne en Afrique? Jeune Afrique Économique, mardi 18
novembre 2014.
Il
est d’ailleurs faux de prétendre, qu’avant la découverte et l’exploitation des
ressources naturelles, tous les peuples africains étaient orphelins de la
richesse. En effet, l’entreprenariat ainsi que les relations commerciales sur
le continent ne date pas d’hier. La preuve est que parmi les peuples les plus
dynamiques en Afrique subsaharienne, nous retrouvons les Bamilékés du Cameroun
et les Igbos au Nigéria. Ces deux peuples ont acquis une solide réputation sur
le continent africain ainsi qu’ailleurs dans différents domaines d’activités
entrepreneuriales (agroalimentaires, industries, banques, transports, services
aux entreprises) incluant aussi les professions libérales.
Quels
facteurs sont à l’origine de ce succès? Ils ont en commun d’avoir une société civile
très structurée, comprenant des associations ou des confréries où les membres
se rencontrent régulièrement dans le but de résoudre les problèmes
socioéconomiques de la communauté. Lors de ces rencontres, il est question de
la mobilisation des capitaux financiers par l’entremise des « associations
tontinières[1]»
appelé Essussu chez les Igbos et Tchoua’ah ou Djangui chez les Bamilékés. Ces capitaux financiers sont utilisés à
des fins de fructification ou bien pour résoudre des problèmes sociaux. Ces
types de réseaux d’entraides économiques offrent aussi une sorte de sécurité
sociale privée assurant une cohésion sociale à l’intérieur du groupe[2].
Les
diasporas vivant à l’étranger, largement scolarisées, apportent aussi leur
contribution en réinvestissant et en introduisant des innovations dans leur
patrie d’origine comme en témoigne l’exemple de la réimportation au Nigéria par
la diaspora Igbo des techniques textiles taïwanaises[3]. Quant aux Bamilékés, ils
sont fréquemment comparés aux Japonais en raison de leur combativité, leur
discipline et le respect des valeurs familiales traditionnelles. Lorsqu’ils
s’installent à un endroit, ils ont tendance à réussir là où plusieurs ont
échoué car ils savent utiliser de façon optimale les informations dans leur
environnement permettant la création d’opportunités d’affaires.
[1]
La tontine est une association collective d’épargne, qui réunit des
épargnants pour investir en commun dans un actif financier ou d'un bien dont la
propriété revient à une partie seulement des souscripteurs. Les tontines
revivent aujourd'hui dans un contexte où les banques refusent d'intervenir. Des
groupes d'amis, voisins ou collègues peuvent se constituer afin de proposer,
sur la base de la confiance, des aides à chacun des membres : les
cotisations des membres et les remboursements permettent de financer les
projets suivants. Ce système est possible car il y a de vraies relations
sociales. Dans des contextes plus individualisés, ce sont les organismes de
microcrédit qui prennent le relais. (ONU, 2004)
[3] David Ambrosetti. Sud-Soudan: conquérir l'indépendance,
négocier l'État. Éditions Karthala, 2011
Les
Bamilékés et les Igbos sont la preuve même que les Africains peuvent réussir
individuellement en affaire tout en conservant des valeurs collectives et
culturelles très solides. À ce titre, ils doivent servir de modèle aux autres
peuples de l’Afrique subsaharienne qui désirent être sur la voie d’un succès
durable alliant la prospérité économique, l’innovation et le respect de la
culture.
Simon
Cloutier-Cyr
Wise & Expert Afrique
Chargé de projet
10
avril 2015
Africa the
continent of the future but what position did occupy knowledge-based economy?
It is not uncommon today to hear the optimistic speech
claiming that Africa is the continent of the future. This assertion is appropriate
if they consider its natural resources’, superficies and the population that
represents a growing market. However, despite
relatively high rates of economic growth, « inflated » by the oil exploitation,
most of the Africa countries have lost many years in terms of socioeconomic
development. Notwithstanding of all
aids thus the FMI and World Bank
Structural Adjustment Plans, Africa is
towed behind Asia and South-America. Between 1970 and 2010, Africa's share of
world trade has fallen from 6% to
3%, for then proceeding at 3,2% in 2013. Whereas, the portion of the continent
in world’s population expanded from 9,9% to 14,9%[1], during same period.
Several factors explain this, but we will focus our
attention on only one, that remains vital for the economic take-off of the
continent, whether higher education. Currently, Africa is the lowest school
enrolment continent and this greatly influences socioeconomic development. The
phenomenon of urbanization associated the emergence of an educated middle class
composed of both business people and professionals with rising purchasing power
and saving capacity. That’s requires a local property workforce trained in
specialised institutes or universities to meet development needs. Yet, in this
field, sub-Saharan Africa still lags behind, with a gross enrolment rate in
higher studies of 8,1% in 2012, while the world average is 32,1%[2].
In the context of
precariousness, the size that takes the «brain drain» phenomenon of Africans
brains by West universities, constitute a perpetual bleeding for the continent[3]. The attractiveness of a better quality of life and
working conditions seduced many Africans students who often decide not to come back to their countries of
origin. A survey conducted in
2010 in the United States, identified the Africans as the most graduate group
of migrants: 48% of them have a college level plus three years of education,
versus 24% of Caucasian group and 13% of African-Americans[4].
If Africa truly desires to become a continent of the
future, development of a knowledge-based economy should be among its priorities. As demonstrated by the African experience, oil and others raw materials
are not a pledge of development. India, a giant demographic comparable to
Africa, has preferred to bet on knowledge-based economy into specifically
target the field of agriculture, NTIC services and engineering. That effort
bore fruit, because unlike Africa, India has reached self-sufficiency in
agriculture and is
becoming an exporter of IT services.
The development of an
African knowledge-based economy will require important financials and humans
investments. Innovation and leadership must
be promoted in the achievement of winning conditions allowing students to
achieve their fullest potential. Then, men and women’s will not be forced to
receive training abroad overseas which remains costly for their families.
Simon Cloutier-Cyr
September 6th 2014
[1]
Banque Mondiale, 2013
[2] Correspond
au pourcentage de la population totale du groupe de
cinq ans après la sortie de l'école secondaire (UNESCO, 2013).
[3] Décolonisez l’Afrique!, Bernard Lugan,
2011, Ellipses, 202p.
[4] Jeune
Afrique. Sommet État-Unis-Afrique : le « brain drain » des
universités américaines. 5 août 2014.
L’Afrique un continent d’avenir mais quelle place occupe l’économie du savoir?
Il
n’est pas rare aujourd’hui d’entendre le discours optimiste, clamant que
l’Afrique est le continent de l’avenir. C’est une affirmation pertinente si
l’on tient compte de ses richesses naturelles, de sa superficie et de sa
population qui représente un marché en expansion. Cependant, malgré des taux de
croissance économique élevés, « gonflés » par le pétrole, la majorité
des pays africains accusent un retard important en matière de développement
socioéconomique. En dépit de toutes les aides et des plans d’ajustement du FMI
ou de la Banque mondiale, l’Afrique est à la remorque derrière l’Asie et
l’Amérique latine. Entre 1970 et 2010, la part de l’Afrique dans le commerce
mondial est passée de 6% à 3%, pour ensuite remonter à 3,2% en 2013. Tandis que
la part du continent dans la population mondiale est passée durant la même
période de 9,9% à 14,9%[1].
Plusieurs
facteurs sont à l’origine de cette situation, mais nous porterons notre
attention sur un seul, qui demeure vital pour le décollage économique du
continent, soit l’éducation supérieure. Actuellement, l’Afrique est le
continent le moins scolarisé et cela a des répercussions sur son développement
socioéconomique. Le phénomène de l’urbanisation accompagne l’émergence d’une
classe moyenne composée de gens d’affaires et de professionnels disposant d’un
pouvoir d’achat ainsi que d’une capacité d’épargne. Ce qui nécessite une main
d’œuvre locale de qualité formée dans des universités et/ou des instituts
d’enseignement supérieur afin de répondre aux besoins du développement. Or,
dans ce domaine, l’Afrique subsaharienne accuse un retard avec un taux brut
moyen d’inscription aux études supérieures de 8,1% en 2012 alors que la moyenne
mondiale se chiffre à 32,1%[2].
Dans
ce contexte de précarité, l’ampleur que prend le phénomène du « brain
drain » des cerveaux africains par les universités occidentales, constitue
une hémorragie perpétuelle pour le continent[3].
L’attrait d’une meilleure qualité de vie et des conditions de travail
supérieures séduit de nombreux étudiants africains qui décident souvent de ne
pas retourner chez eux. Une enquête réalisée en 2010 aux États-Unis,
identifiait les Africains comme le groupe de migrants le plus diplômé : 48 %
d'entre eux ont un niveau bac +3, contre 24 % des membres de la communauté
blanche et 13 % des Africains-Américains[4].
Si
l’Afrique désire réellement être le continent de l’avenir, le développement
d’une économie du savoir doit figurer parmi ses priorités. L’expérience
africaine démontre que le pétrole et les autres matières premières ne sont pas
un gage de développement. L’Inde, un géant démographique presque comparable à
l’Afrique, a préféré miser sur l’économie du savoir en visant spécifiquement
les domaines de l’agriculture, les services NTIC et l’ingénierie. Cela a porté
ses fruits, puisque contrairement à l’Afrique, l’Inde a atteint
l’autosuffisance agricole et est même devenue exportatrice de services
informatiques.
Le
développement de l’économie du savoir africain nécessitera des investissements
financiers et humains importants. L’innovation et le leadership doivent être
mis de l’avant dans la réalisation des conditions gagnantes permettant aux
étudiants de réaliser leur plein potentiel. Alors, les hommes/femmes de talents
ne seront plus obligés d’aller suivre une formation à l’étranger, qui demeure
coûteuse sur le plan financier pour les familles.
Simon
Cloutier-Cyr
Collaborateur Entrepreneur Apprenti (CEA)
6
septembre 2014
[1]
Banque Mondiale, 2013
[2]
Correspond au pourcentage de la population totale du
groupe de cinq ans après la sortie de l'école secondaire (UNESCO, 2013).
[3]
Décolonisez l’Afrique!, Bernard
Lugan, 2011, Ellipses, 202p.
[4]
Jeune Afrique. Sommet État-Unis-Afrique : le « brain drain » des
universités américaines. 5 août 2014.
Entre les discours et la réalité économique de l’Afrique subsaharienne
Les
investisseurs économiques ont souvent eux la fâcheuse tendance à percevoir
l’Afrique subsaharienne comme un tout homogène composé d’acteurs rationnels
affichant entre eux des différences culturelles superficielles. Or, la réalité
est tout autre. L’Afrique est une immense mosaïque ethnique, linguistique et
culturelle dont la répartition géographique dépasse de loin les frontières
étatiques artificiellement découpées par les colonisateurs. Au-delà des
postulats philosophiques universalistes de l’Occident, l’Homme africain se
distingue de son homologue occidental par son appartenance indissoluble à un
réseau complexe de solidarités et de dépendances liés aux ancêtres, par sa
notion du temps axé sur l’instant présent et son rapport avec les forces
hostiles de son environnement.
L’historien et
africaniste Bernard Lugan résume bien ces différences fondamentales : « Or, les Africains ne sont pas des Européens
pauvres à la peau noire et c’est parce que le corps social africain n’est pas
celui de l’Europe ou celui de l’Asie, que la greffe n’a pas pris. Comme si un
jardinier s’obstinant à vouloir greffer un prunier sur un palmier s’étonnait
qu’en dépit des montagnes d’engrais déversées, son opération n’aboutisse pas. Les recettes appliquées en Asie ou ailleurs
ont échoué en Afrique tout simplement parce que nous sommes en présence d’un
cas avéré d’incompatibilité des cultures. Ce n’est donc pas en continuant à
noyer les Africains sous les aides et les subventions qu’ils finiront, un jour,
par ressembler aux Européens, aux Asiatiques ou aux Américains.[1]
»
Il est dès lors inutile d’espérer que les africains
adopteront un jour l’intégralité des schémas de pensée de l’Occident, avec ses
valeurs individualistes, son cartésianisme et sa recherche de l’égalité tout
azimut. Dans ce contexte, il est alors impératif de favoriser l’émergence d’un
nouveau type d’entreprenariat adapté aux réalités et aux attentes des
différents peuples de l’Afrique subsaharienne. Les hommes et les femmes de ce
continent doivent puiser leur créativité dans leur culture millénaire, sans
pour autant être fermé aux idées novatrices provenant de l’extérieure. Parmi
ces nouvelles idées, il y a notamment le management et le leadership en
entreprise sociale. Ce nouveau crédo propose un modèle d’affaire basé sur
l’éthique et la création de richesse durable dans le respect des cultures
locales. Ce modèle représente une alternative intéressante pour les PME
africaines qui désirent acquérir une base solide en développement des affaires
afin d’être en mesure d’affronter les défis futurs du continent.
Simon Cloutier-Cyr
Collaborateur Entrepreneur Apprenti (CEA)
14 juillet 2014
Au-delà
des sempiternels discours « afro-pessimistes » ou « afro-nihilistes »[1]
entourant le développement du continent africain véhiculé par les médias
occidentaux, l’Afrique subsaharienne regorge d’entrepreneurs, animés par une
créativité débordante et une volonté de fer d’occuper une place de choix sur le
marché local. Selon la Banque Africaine de Développement (BAD), le secteur
privé africain est avant tout constitué à 67 % de micro-entreprises de
moins de vingt employés[2]. Cependant,
la contribution de ces PME à la production totale demeure encore limitée en
raison la place qu’occupent les grandes multinationales. Carlos Lopes, qui est le
secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour
l'Afrique (Uneca), résume fort bien cet enjeu : « Les conditions semblent de plus en plus
favorables à l'émergence d'un secteur privé capable d'accélérer la
transformation du continent. Mais pour cela, les PME doivent devenir la
priorité.[3]»
D’autant plus, dans un contexte de précarité socioéconomique, elles constituent
un facteur essentiel dans la création d'emplois et la
réduction de la pauvreté.
En
ce moment, un grand nombre de pays africains retiennent particulièrement l’attention
de par la diversité de leurs potentiels énergétiques et miniers. À ce titre, le
Gabon et la Guinée sont des marchés cibles. Ces deux pays, à faible superficie
et population par rapport à l’ensemble du continent, disposent d’importantes
ressources à l’intérieur de leurs territoires respectifs. Ces ressources
doivent servir à la création d’une richesse durable tout en ayant le plus grand
respect pour les cultures traditionnelles et le souci des générations futures.
La bonne marche des entreprises africaines doit s’associer aux valeurs
reconnues sur ce continent, que sont la solidarité, l’entraide et le soutien
des personnes âgées. À ce titre, la PME africaine doit se différencier de ses
homologues occidentaux et développer un modèle original qui est proprement
adapté aux réalités locales.
Simon Cloutier-Cyr
Collaborateur Entrepreneur Apprenti (CEA)
28 avril 2014
[1] Yanga Ngary, B. La modernisation quotidienne au Gabon : La
création des toutes petites entreprises. L’Harmattan, 2008, p.15
[2] Ballong, S. Au-delà de l’africapitalisme. Jeune Afrique Économie. 17 mars 2014.
http://economie.jeuneafrique.com/regions/international-panafricain/21579-au-dela-de-lafricapitalisme.html
[3] Ibidem
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